JE PENSE TOUJOURS À LA PEINTURE QUAND JE FILME

Ajout du ve.18 janvier 2008






À la lecture de l’article de Jean-Claude Lebenszteijn « FLORILÈGE DE LA NONCHALANCE » in le n° 473 (année 1986) de la revue CRITIQUE (pp. 1025- 1052) je reprends les citations qu’il fait, à propos de la SPREZZATURA, celles-ci me faisant penser à mon attitude de filmeuse pour EXSPECTATIO. Voici :



« Si tu les examines bien, tu trouveras là-dedans des inventions très-merveilleuses… compositions de batailles d’hommes et d’animaux, ou diverses compositions de paysages et de choses monstrueuses, diables et choses du même genre.» [Léonard de Vinci, « Traité de la peinture », éd ; McMahon, t. II, f. 35v.] Là, je pense à la flaque d’eau noire, les reflets du ciel dedans et à la manière du passage de mon regard au travers de la caméra sur ce micro-paysage — le FILMAGE est cette « manière du passage de mon regard au travers de la caméra », celle-ci étant mon pinceau.
J. Cl. Lebenszteijn, dans le paragraphe ÉBAUCHES énonce ceci (p. 1033) : « Spirituel dans le texte de Roger de Piles, veut dire vif, animé. (…) L’esprit de la touche, c’est son feu, comme on disait aussi, un certain frétillement, par exemple, qui chez de Piles agite les feuilles des arbres : « Il faut que les arbres en soient differens de forme, de couleur, & de touche, autant que la prudence & la variété de la Nature le requièrent, & que cette touche soit toujours légère & fretillante, pour parler ainsi : » [Roger de piles, « L’Idée du peintre parfait », « Abrégé de la vie des Peintres » (1699), p. 5-6.] Là, je pense au frétillement de l’image vidéographiée que j’ai découvert pour la première fois avec « Sylvain des sources » (mars 2007), lors du long plan séquence de l’eau orangée de l’étang, le branchage, & le son des cloches de midi auxquels j'ai ajouté la voix énonçant la liste des titres de livres de Pascal Quignard.
« Le langage de la SPREZZATURA est toujours pour ainsi parler ; frétillant, pas très fixé : le métaphorique y emporte un élément de surprise. La vraie peinture, pour Roger de Piles, a ce caractère : elle surprend et retient le spectateur comme malgré lui, irrésistiblement. « La veritable Peinture est donc celle qui nous appelle (pour ainsi dire) en nous surprenant : & ce n’est que par la force de l’effet qu’elle produit, que nous ne pouvons nous empêcher d’en approcher comme si elle avoit quelque chose à nous dire. » [Roger de Piles, « Cours de Peinture par principes », p.4.]
C’est ce pour quoi je filme, je me vois en grande (merveilleuse) correspondance avec ces mots.